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Les forêts denses humides d'Afrique occidentale et centrale recèlent une
grande partie de la biodiversité du continent. Elles abritent en effet
plus de 60 % des Passereaux et des Lépidoptères ou plus de 80 % des Primates
africains.
Cette richesse est inégalement distribuée. Les forêts de l'Ouest renferment
un nombre bien plus faible d'espèces que celles d'Afrique centrale et
présentent aussi un taux d'endémisme moins élevé. Elles sont aussi plus
dégradées et la faune y est en voie d'appauvrissement plus intense qu'en
Afrique centrale.
Dans le cas des Primates, mais aussi pour d'autres groupes animaux, leur
diversité est maximale dans les forêts d'Afrique centrale atlantique (du
Cameroun au Gabon) et dans l'Est de la République Démocratique du Congo
(RDC). Toutes espèces animales confondues, le pays à la biodiversité la
plus importante est la RDC, suivi du Cameroun. En Afrique occidentale,
les deux pays les plus riches sont le Nigéria et la Côte d'Ivoire.
Les zones montagneuses sont généralement riches en espèces d'Oiseaux et
de Batraciens, et renferment de nombreuses espèces endémiques, que l'on
ne retrouve nulle part ailleurs. C'est le cas des hautes terres du rift
Albert (Est de la RDC), de celles du Cameroun et, dans une moindre mesure,
des massifs montagneux comme celui des monts Nimba, en Afrique occidentale.
Les îles telles que Sao Tomé, Principe ou Bioko sont par contre plus pauvres
en espèces que le continent tout en renfermant un nombre appréciable d'Oiseaux
endémiques.
Outre ces montagnes et ces îles, sur lesquelles se sont développés des
peuplements animaux particuliers, d'autres facteurs physiques et biologiques
permettent de reconnaître des sous-ensembles " zoogéographiques " au sein
d'un peuplement commun aux forêts Ouest et centre-africaines. Les forêts
de basse et moyenne altitude d'Afrique centrale peuvent par exemple être
subdivisées en plusieurs sous-ensembles : forêts de la côte atlantique,
forêts de la cuvette centrale congolaise, forêts de l'Est de la RDC,...
Certains fleuves et rivières ont ainsi joué le rôle de barrières, en particulier
vis à vis de la dispersion des Mammifères : c'est le cas des fleuves Congo,
Sanaga et Cross ou de l'Oubangui, par exemple. Le couloir du Dahomey,
où la forêt n'a pu subsister au cours des temps passés, a aussi joué le
rôle de barrière séparatrice entre divers Batraciens, favorisant une évolution
parallèle des espèces de part et d'autre de cette barrière. Certaines
espèces sont aussi inféodées à des milieux bien particuliers, telles que
les forêts marécageuses, par exemple.
Enfin, au cours des périodes géologiques passées, l'Afrique a subit des
alternance de périodes humides et de périodes sèches : des grands blocs
de forêt dense humide ne subsistant à certaines époques que dans des refuges
forestiers où le climat restait favorable. Dans ces refuges forestiers,
de nombreuses espèces ont pu subsister et l'évolution s'est perpétuée,
favorisant localement une biodiversité plus importante que partout ailleurs.
Des espèces confinées à l'Afrique de l'Ouest possèdent des proches parents
en Afrique centrale, soulignant à la fois les mécanismes évolutifs qui
ont conduit à l'individualisation des deux régions mais aussi leur étroite
parenté. C'est le cas du Picatharte chauve (Picathartes gymnocephalus)
d'Afrique occidentale, et du Picatharte du Cameroun (P. oreas), oiseaux
de grande taille du sous-bois forestier, ou des Micropotamogales du mont
Nimba (Micropotamogale lamottei) et du Ruwenzori (M. ruwenzorii), petits
Insectivores primitifs distants d'environ 4.500 km !
Les forêts d'Afrique occidentale et centrale abritent de nombreuses espèces
animales endémiques. Celles-ci peuvent présenter une aire de répartition
très restreinte, comme le Cercopithèque à queue de soleil (Cercopithecus
solatus), endémique des forêts du Gabon central, ou plus large. C'est
le cas du Chimpanzé nain (Pan paniscus), des forêts de la cuvette congolaise,
ou de l'Okapi (Okapia johnstoni), du Nord et Nord-est de la RDC. Certaines
espèces ont par contre une aire de répartition en plusieurs blocs nettement
disjoints. C'est le cas d'un petit Carnivore, la Poiane (Poiana richardsoni),
ou encore du Gorille (Gorilla gorilla) dont certains scientifiques estiment
qu'il s'agit non pas de sous-espèces mais de plusieurs espèces. D'autres
espèces endémiques ont une distribution très fragmentée, comme l'Hippopotame
pygmée (Hexaprotodon liberiensis), d'Afrique occidentale côtière.
Parmi les espèces à large répartition, mais à distribution plus ou moins
fragmentée, on peut citer l'Hippopotame (Hippopotamus amphibius), le Lamantin
(Trichechus senegalensis), liés aux milieux aquatiques, la Panthère (Panthera
pardus) ou l'Elephant (Loxodonta africana). Bien que d'importantes populations
d'Eléphants résident encore dans les forêts d'Afrique centrale, la chasse
intensive qui leur est faite a entraîné la quasi-disparition de l'espèce
dans les forêts d'Afrique de l'Ouest. Certaines espèces sont ainsi en
danger de disparition du fait de la chasse excessive et de la destruction
de leur habitat. C'est le cas d'une Antilope forestière, le Céphalophe
zébré (Cephalophus zebra), présent uniquement en Côte d'Ivoire, au Libéria
et au Sierra Léone.
Bien que l'on sache sans l'ombre d'un doute que certaines de ces espèces
sont en danger de disparition, nous ne disposons pas toujours des informations
et du recul suffisants pour évaluer avec fiabilité le statut de conservation
et les tendances évolutives d'un grand nombre d'entre elles. Ces recherches
en biologie de la conservation constituent un vaste champ d'investigation
encore trop peu défriché dans la région.
Dupuy
B. & Nasi R. (Eds.), 1999.- Gestion des écosystèmes forestiers denses
d’Afrique tropicale humide. Références bibliographiques : Cameroun, Centrafrique,
Congo, Côte d’Ivoire et Gabon. Cirad, Montpellier, France (cédérom).
Dupuy B.,
Gérard C., Maître H.-F., Marti A. & Nasi R., 1998.- Gestion
des écosystèmes forestiers denses d’Afrique tropicale
humide. 1. Gabon. Cirad, Montpellier, France. Coll. Les bibliographies
du Cirad, 9 : 207 p.
Dupuy B.,
Loumeto J., Amsallem I., Gérard C. & Nasi R., 1999.- Gestion
des écosystèmes forestiers denses d’Afrique tropicale
humide. 2. Congo. Cirad, Montpellier, France. Coll. Les bibliographies
du Cirad, 10 : 145 p.
Nasi R.,
Amsallem I. & Drouineau S. (Eds.), 1999.- La gestion des forêts
denses africaines aujourd’hui. C. R. Séminaire Forafri, 12-16
octobre 1998, Libreville, Gabon. Cirad, Montpellier, France (cédérom)
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